Le comice agricole

Dans la première moitié du XIXe siècle, l’agriculture de notre canton est en «souffrance». Les sols sont pauvres, couverts de landes, on y pratique de longues jachères. L’élevage médiocre ne fournit pas assez de fumier, seul engrais employé alors. Les cultures principales sont le sarrasin, le seigle, l’avoine, le lin et le chanvre. Les outils manquent et sont peu performants. La terre appartient à des propriétaires fonciers et est exploitée par des métayers.

Sous l’impulsion de Jacques HAMARD qui a créé une ferme-modèle au bourg de Saint-Mars, des propriétaires, désireux d’augmenter leurs revenus en améliorant les pratiques agricoles, vont fonder le Comice Agricole du canton de Landivy. Les statuts sont approuvés par l’autorité préfectorale le 24 décembre 1840.

Voici la composition de ce premier bureau :

• Président : M. LE TOURNEUX Paul, député, de Fougerolles.
• Vice-président : M. TURMEAU, juge de paix, de Landivy.
• Secrétaire : M. DIVAY, avocat à Fougères.
• Vice-secrétaire, trésorier : M. HAMARD, directeur de la ferme-modèle, de Saint-Mars
• Membres : Pour Saint-Berthevin : M. COEURET, propriétaire.
  • Pour Désertines : M. FERON, médecin.
  • Pour La Dorée : M. BRILLAND, maire.
  • Pour Fougerolles : M. TESTARD, propriétaire.
  • Pour Saint-Mars : M. LE BANSAYE, maire.
  • Pour Montaudin : M. GOUAULT, ancien notaire.
  • Pour Saint-Ellier : M. DELOUEY, propriétaire.
  • Pour Landivy : M. LE DAUPHIN DUBOURG, maire.

Pour ce 1er Comice cantonal, des primes sont prévues :

• pour les cultures que l’on veut encourager : pommes de terre, carottes blanches à collet vert et trèfles.
•  pour le labourage.
• pour les animaux domestiques : juments poulinières suivie de leur poulain, taureaux d’un à trois ans, vaches de 2 à 10 ans, génisses d’un à 3 ans (sans aucune précision de races).

Il est prévu également de distribuer gratuitement aux cultivateurs, le jour du concours, des graines de betteraves, carottes blanches et chicorée sauvage.

Voici quelques passages écrits par Jacques Hamard pour relater ce premier comice :

« Ce jourd’hui 21 septembre 1841, à la ferme modèle exploitée par Mr Hamard, à Saint Mars sur la Futaye, les membres du Comice agricole du Canton de Landivy se sont réunis en assemblée générale…

Dans un champ de la ferme modèle, avaient été réunis et classés suivant leur espèce les animaux domestiques qui avaient été amenés pour concourir à l’obtention des primes et voici le chiffre des animaux de chaque espèce qui ont concouru : 5 juments poulinières suivies de leurs poulains, 7 poulains d’un à trois ans, 8 taureaux, 4 vaches et 4 génisses.

Le jury s’est successivement occupé de l’examen des divers animaux et s’est ensuite retiré sous une tente dressée au milieu du champ, pour arrêter définitivement la distribution des primes…

On passe ensuite à l’examen des charrues, le Comice a le regret de voir que deux concurrents seulement se présentent quoiqu’il y ait trois primes à distribuer, et que tous les deux ont amené la charrue du pays sans aucun perfectionnement. Les deux concurrents tracent un sillon chacun, puis les domestiques de la ferme modèle font fonctionner un araire Dombasle, afin de montrer la supériorité des labours exécutés avec cet instrument.

M le Président prononce ensuite au milieu de la foule qui l’entoure, un discours dans lequel il démontre les désavantages liés à l’agriculture routinière du pays et la nécessité pour le Canton, de profiter enfin des perfectionnements que l’étude et l’expérience ont fait découvrir ; il exhorte les cultivateurs à rivaliser de zèle dans leurs cultures ainsi que dans le choix et l’éducation des animaux ; il proclame ensuite le nom de ceux qui ont obtenu des primes et, sur leur quittance, le prix leur en est versé par le trésorier… ».

En Mayenne, le Canton de Landivy fut pionnier dans la création des comices. D’autres cantons suivront son exemple : Ambrières en 1841, Le Horps en 1842, Mayenne en 1843. Ils devancent la loi du 20 mars 1851 qui statue sur les comices agricoles, les chambres d’agriculture et le Conseil général de l’Agriculture

C’est une véritable « révolution agricole » qui va s’opérer dans la 2ème moitié du XIXème siècle. L’élevage bovin va prendre une place de plus en plus importante. Le commerce, les foires et marchés vont se développer et chaque année, le dernier mardi de septembre, une foule nombreuse va se donner rendez-vous à Saint-Mars pour le Comice, comme le témoigne cette carte postale ancienne (photo prise vers 1900).

Notre bon vieux Comice a eu 170 ans en l'an 2010, mais il n’a pas pris une ride. Il était un précurseur de l’intercommunalité. Depuis les années 1990, ce n'est plus seulement Saint-Mars qui accueille le comice agricole mais toutes les communes du canton de Landivy à tour de rôle. Il est désormais nommé "Foire d'Automne".

Le Comice Agricole a su évoluer avec son temps, il est toujours la vitrine d’une agriculture moderne et dynamique où l’on récompense l’excellence de l’élevage et du labour, il remplit toujours son rôle éducatif (concours de jugement du bétail) et sait attirer les foules comme nous pouvons le constater tous les ans dans le canton de Landivy.